Doucement mais sûrement la forêt amazonienne brésilienne perd du terrain. En douze mois, la végétation tropicale a encore reculé de 11 968 km2 (comptez 700.000 km² rien que pour ces 30 dernières années, chiffres du Monde), soit une accélération du rythme de la déforestation de 3,8 % en un an. Le ministre de l’environnement du Brésil, Carlos Minc, considère pourtant que « la déforestation est stabilisée« .
L’essentiel des destructions (de l’ordre de 80%, chiffres du Monde) est illégal . La législation actuelle ne parvient à arrêter ni les tronçonneuses ni les incendies volontaires (22.000 incendies en 2007, chiffres du Monde), et les défenseurs de l’environnement se mobilisent aujourd’hui pour empêcher la révision du Code forestier, qui pourrait, disent-ils, être fatale à la forêt. Ils ont face à eux le puissant lobby de l’agrobusiness, qui assure manquer de terres pour répondre à la demande. (NdDDC : la demande de quoi ? de soja transgénique ? d’agrocarburants ?)
A Brasilia, le Congrès discute actuellement de la diminution de la « réserve légale » instaurée par le Code forestier, cette part de végétation sauvage que tout propriétaire doit préserver, sur une parcelle située dans le bassin amazonien. Cette réserve passerait de 80 % à 50 % de la surface. Le Sénat a approuvé cette disposition en décembre 2007, au lendemain de la conférence sur le climat de Bali. La commission de l’environnement de la Chambre des députés, dominée par des représentants du monde rural, pourrait l’imiter avant la fin de l’année, mais les débats y sont tendus. (…)
« Le gouvernement doit clarifier sa position, estime José Sarney Junior, député du Parti vert et membre de la commission parlementaire, car il hésite entre laisser la frontière agricole avancer sur la forêt et préserver le rôle d’une région qui rend service à la planète entière. » L’importance du secteur agricole, premier exportateur mondial de soja et de viande, a cependant souvent incité les autorités de Brasilia à donner raison au monde rural. (…)
Dans le nouveau projet, les ruralistas (lobby agricole) ont pour l’instant obtenu la possibilité de replanter sur la partie déboisée des espèces dites « exotiques », étrangères au milieu naturel, par exemple des palmiers qui assureraient un bon rendement aux propriétaires. Ceci au grand dam des écologistes.
Ce sont les Etats brésiliens de l’Amazonie, rongés par l’agriculture intensive, qui battent les records de déforestation. Cette année, la moitié des destructions a eu lieu dans l’Etat du Para. Selon le ministère de l’environnement, seules 3 des 36 municipalités où se concentrent l’abattage des arbres et la lutte contre la déforestation ont respecté la loi de 80 %. Brasil Novo n’a conservé que 17,47 % de sa forêt. (…)
« Le point de non-retour en Amazonie est proche, estime Gilvan Sampaio, de l’Institut national de recherche spatiale, qui observe par satellite la déforestation. Si 30 % de la forêt étaient encore détruits, cet écosystème cesserait d’exister, remplacé par un autre – une sorte de savane. » Au rythme actuel, la moitié des arbres aura disparu en 2050.
Autres chiffres :
Réserves d’eau : 23 % de l’eau potable de la planète.
Emission de CO2 du Brésil : 1 milliard de tonnes en 2004, dont 75 % sont dus aux brûlis de la forêt.
Lire l’article complet sur Le Monde.
7 commentaires
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5 décembre 2008 à 21:49
Mahie
😦 pas glop du tout tout ça et ça fait un moment que les bras m’en tombent.
6 décembre 2008 à 5:05
Moukmouk
Ne pas oublier que Carlos Minc est un représentant des ruralistas qui a remplacé Marina Sylva parce qu’elle s’opposait à des projet de barrage extraordinairement dangereux pour la forêt.
Les barrages sont en construction, la forêt brule. Et c’est vraiment là le problème, la forêt humide crée en grande partie la pluie dont elle a besoin. Maintenant la forêt amazonienne ne peut plus le faire, et le sol agricole (relativement pauvre) est lavée laissant une latérite très peu propice à l’agriculture. Sauf pour les fermes industrielles qui plantent dans les engrais azotés.
6 décembre 2008 à 12:56
jcm
Eh oui, DDC, c’est d’autant plus navrant que c’est fait avec une stupidité crasse, l’idée étant de disposer de plus de terres afin de produire plus.
On coupe, on bouscule au bulldozer, on entasse puis on brûle à l’air libre pour ne laisser que des cendres sur une terre nue dont on sait qu’elle ne sera (plus ou moins) « riche » que pour un court laps de temps (pour diverses raisons connues).
Un véritable travail de crétins, et la profonde stupidité de cette déforestation est rarement évoquée, pour au moins 2 raisons.
Admettons qu’il puisse y avoir un réel besoin de disposer de plus de terres, ce qui justifierait une certaine déforestation.
L’Amazonie est cette ensemble géographique dans lequel on a mis en évidence la Terra Preta, une terre enrichie de charbon de bois qui présente de très hautes qualités pour l’agriculture.
Pour disposer de terres durablement fertiles il faudrait réduire en charbon de bois l’ensemble des végétaux d’une parcelle et enfouir ce charbon, avec 2 avantages : un dégagement de CO2 imputable à la déforestation infiniment moindre, une fertilité durable des terre ainsi « reconquises ».
Enfin rien n’interdirait de réserver les buissons et branchages à un broyage puis un épandage sur la parcelle, ce qui additionnerait les vertus de la Terra Preta et du BRF (Bois Raméal Fragmenté).
Quand à l’utilisation massive d’engrais azotés (et autres !) mentionnée par Moukmouk, ne nous laissons pas bercer d’illusions par un pétrole redevenu peu coûteux : il y a peu de chances qu’il le reste longtemps, il faudra donc détruire de la forêt quand les surfaces déboisées aujourd’hui seront devenues stériles et trop chères à « amender »…
8 décembre 2008 à 12:44
Saturnas
…c’est que le début, d’accord, d’accord…
10 décembre 2008 à 10:07
Demesure
D’après les chiffres de l’Institut National de recherche spatiale cité par le Monde, la déforestation a été
18 793 km2 en 2005,
13 100 km2 en 2006
(chiffres résumés dans wiki : http://fr.wikipedia.org/wiki/For%C3%AAt_amazonienne )
Donc, la déforestation a bien diminué sur le long terme. De toute façon, une déforestation de 12.000 km2 sur une superficie de 7 Mkm2 de forêts est très faible : il faudrait à ce rythme plus de 100 ans pour que le Brésil, qui a >50% de son territoire couvert de forêts, descende aux taux de forêt des grands pays européen. Nous, en France, avec seulement 30% de territoire couvert de forêt sommes pourtant le premier pays touristique au monde, preuve qu’on n’est pas exactement en « crise écologique ». De toute façon, vu notre niveau de vie et de consommation indécent et nos forêts et notre biodiversité ridicules, nous sommes mal placés pour nous indigner de la déforestation en Amazonie. C’est perçu par les pays du tiers-monde comme du néocolonianisme de citoyens nantis de pays riches.
Le procédé du Monde qui a consisté à isoler un chiffre hors de son contexte pour « brasser du papier » est une atteinte grave à la neutralité journalistique. Je suis devenu systématiquement méfiant à leur égard dès qu’il s’agit d’une soit-disant nième catastrophe écologique.
10 décembre 2008 à 14:05
dieudeschats
Vous me permettrez de ne pas être en accord avec vous. Quelques remarques :
– Il s’agit de forêts primaires, ce n’est absolument pas comparable avec la France. Je précise aussi que je ne suis pas Française.
– Ce n’est pas parce que la France a détruit ses vieilles forêts que c’est une chose positive (ou sans conséquences négatives). Par ailleurs il y a tellement de paramètres différents (climat, géologie, faune et flore, modes de vie, etc.) entre ces deux pays que la comparaison trouve très vite ses limites.
– Des chiffres trouvés sur wikipédia ne sont pas forcément plus fiables que ceux donnés par un journal.
– Ce n’est pas parce qu’il y a du tourisme en France qu’il n’y a pas de crise écologique, je ne vois pas le rapport.
– C’est une réaction normale que d’essayer de préserver la forêt amazonienne, d’autant plus si son propre pays a commis précédemment cette même erreur de déforester à tour de bras. C’est une forme d’ingérence car les autres pays essayent d’influencer, mais de là à parler de néocolonialisme… L’impact de cette destruction concerne tout le monde.
– Vous faites bien d’être systématiquement critique vis-à-vis des informations reçues, mais vous devriez l’être sur tous les sujets et pas que concernant les catastrophes écologiques.
11 décembre 2008 à 21:26
synaptique
Le point important, c’est surtout de voir si la Loi modifiant le minimum requis de « Réserve Légale » que chaque propriété doit maintenir dans son état naturel (80% en Amazonie, 20% ailleurs) va passer ou non. Si elle passe, il va y avoir énormément de terres qui seront déboisées sans que cela n’entre en compte dans les statistiques de déforestation – puisque ça sera devenu légal.
En y réfléchissant bien, ça pourrait être un bon moyen de réduire le taux de 70%… Hum.